La salle est sens dessus dessous. Vous ne savez pas trop ce qu'il s'est passé ici mais il y a plusieurs coussins éventrés qui traînent un peu partout ainsi que des sacs de couchage dépliés, déchirés, en lambeaux déchiquetés sur les tables de métal. Du coup vous vous avancez avec grande prudence, et préférez vérifier que personne n'occupe les lieux, ce qui heureusement est tout à fait le cas.
 Dans un coin de la pièce, trois bouteilles d'eau sont alignées au dessus d'une table. Visiblement, elles ne sont pas là sans raison. Car juste à côté se trouve un lavabo très sale, vous imaginez que ces bouteilles ont été remplie par quelqu'un ayant l'intention de faire des réserves. Pourquoi ? Vous n'en avez pas la moindre idée. Néanmoins là aussi des traces de lutte se dessinent : il y a trois casiers dont deux sont complètement renversés. Vous n'avez pas la force pour les relever, mais dans le troisième vous trouvez une paire de lunettes accompagnée d'un morceau de papier déchiré :

 Que signifient ces mots ? Qui en est l'auteur ? Vous n'en saurez pas plus pour le moment, et vous choisissez plutôt de quitter les lieux.

 - Bonjour, je suis HAL 100000 !

 La voix vous interpelle à peine arrivée dans la pièce. La pièce est, elle, très réduite. Elle se limite à un ordinateur tout ce qu'il y a de plus banal, disposé parfaitement au centre de l'espace. Vous êtes à deux doigts de vous élancer sur cette nouvelle énigme lorsque vous vous forcez à refréner votre frénésie. En effet, une flaque d'eau entoure la borne où est disposé l'écran de l'ordinateur et vous craignez de vous prendre une mauvaise décharge d'électricité en y mettant les pattes. Probablement, cette eau est liée à la condensation qui occupe l'habitacle et qui aurait normalement dû être filtrée grâce au système d'aération. Quelle que soit l'exacte raison, un potentiel danger demeure.

 - Bonjour, je suis HAL 100000 !

 - Bonjour HAL 100000, peux-tu me dire ce qu'est cette salle ? lui demandez-vous.

 - Cette salle abrite le poste de commande du bouclier anti-météores.

 - Et quel est son état ?

 - Inactif.

 Vous vous attendiez un peu à cette réponse évidente, alors vous enchaînez sur une autre question :

 - Y a t-il un moyen de réactiver le bouclier ?

 - Il y en a un, sinon cette salle n'aurait pas d'intérêt, vous répond t-il d'un air passablement cynique. Je vais vous afficher sur l'écran la séquence qu'il faudra répéter sur les boutons de la console pour réactiver le bouclier anti-météores.

 La démarche semble simple, mais la console se trouve juste devant l'écran, et la flaque d'eau l'isole de toute intervention. De là où vous vous trouvez, vous arrivez néanmoins à apercevoir la séquence qu'affiche l'ordinateur HAL 100000 :

 Vous comprenez que l'eau a probablement court-circuité le système intégré de l'écran, ce qui explique l'affichage corrompu de la séquence... Il vous faudra réfléchir pour déterminer la bonne combinaison de boutons sur lesquels appuyer, ou trouver une autre parade.

 La pièce où vous arrivez est baignée de magnifiques lueurs solaires particulièrement chaleureuses. Celles-ci sont filtrées par des rangées de baies vitrées très robustes mais assez discrètes pour vous donner l'impression de véritablement marcher dans l'espace ! L'horizon lointain est occupé par la douce magie de l'étoile réchauffant votre monde et votre cœur, par cette lumière qui rend chaque jour votre vie plus joyeuse (ce qui n'est pas peu dire).
 Fort judicieusement, vous vous trouvez dans la salle récoltant l'ensemble des données solaires, notamment pour ce qui concerne sa position, l'intensité des éruptions à sa surface, leur localisation, la quantité photonique reçue au sein de la station. Une grille attire votre attention plus qu'une autre, concernant les coordonnées optimales d'orientation des panneaux solaires relativement aux positionnements de la station :

 Ces suites de nombres vous sont peu familières, vous préférez donc vous en éloigner pour accroître votre collection d'objets. Malgré un vieil écran d'ordinateur, quelques stylos et des morceaux de papier, il n'y a rien de plus ici. Vous commencez à désespérer doucement, craignant de ne jamais parvenir à sauver la station spatiale de son funeste destin... Heureusement, le temps est clair dehors, il faut parfois voir le peu de positif dans un océan de négativité.

 Dès que vous sortez du sas, vous êtes pris d'un sursaut en croyant voir une silhouette juste en face de vous ! Mais il ne s'agit là que d'une combinaison de protection ressemblant à celles utilisées lors d'expériences sur la radioactivité. Elle n'est aucunement vivante et n'a rien de particulier sinon qu'elle doit probablement protéger de divers rayonnements.
 Plus en avant, un bourdonnement continu s'emploie à titiller vos oreilles. Au centre, vous apercevez un grand boîtier en verre transparent au sein duquel une grosse lentille est posée sur sa tranche, maintenue par quatre broches d'acier. Le bruit incessant vient de l'extrémité du boîtier où un moteur de taille moyenne semble se charger en une énergie dont vous ne connaissez ni la source, ni la destination.
 C'est au moment où le bourdonnement s'arrête que vous voyez un flux violacé s'emparer de la salle. Durant quelques secondes, la machine a expulsé de ses entrailles un flot constant de lumière, pénétrant la pauvre lentille de verre, pour finalement s'interrompre et reprendre de plus belle son bourdonnement. Plusieurs fois le même processus s'opère, le moteur se charge, s'interrompt, puis concentre son rayon sur le matériel optique.
 Vous ne cherchez pas à comprendre la finalité de cette expérience, ni même si elle est parfaitement contrôlée ou parfaitement contrôlable (vous ne trouvez aucun bouton pour l'arrêter). Néanmoins il semble possible de récupérer la lentille, le boîtier de verre n'étant bloqué que par un loquet que rien n'empêche de retirer, sinon la prudence.

 Vous voici entrée dans une salle recouverte à moitié par d'épaisses parois en verre. La vue qui vous est accordée dépasse de loin tout ce que vous pouviez imaginer du cosmos. Tant la pièce est ouverte sur le vide extérieur, vous êtes envahie par l'impression d'être entourée de cette obscurité caractéristique, cette régularité qui ne paraît avoir de limites.
 La salle s'avère être une coupole d'observation servant aux recherches indirectes sur l'espace grâce notamment à un imposant téléscope à rayons X visant à étudier les très éloignées étoiles à neutrons. Mais ce qui vous comble davantage, c'est surtout de rester accrochée à cette vision magnifique de l'espace, vision dont vous n'arrivez à vous défaire. Pourtant très vite, une voix mécanique vous sort de votre torpeur :

 - Bonjour, je suis le robot ouvrier MAR-VIN 6X de 2ème génération, que puis-je faire pour vous ?

 Cette apparition soudaine vous fait sursauter et il vous faut quelques instants supplémentaires pour trouver l'origine de cette voix, provenant d'un petit haut-parleur incrusté dans l'une des parois de la pièce.

 - Bonjour, vous m'entendez ? s'impatiente le robot.

 - Oui, oui, je vous entends. Pouvez-vous m'aider à comprendre ce qu'il se passe sur cette station ? On m'a envoyé pour éviter qu'elle ne soit détruite, que dois-je faire ?

 - Je regrette, je n'ai pas les capacités nécessaires pour répondre à vos questions, je suis le robot ouvrier MAR-VIN 6X de 2ème génération.

 - Alors peut-être pouvez-vous m'indiquer où se trouve le réacteur ?

 - Je regrette, je n'ai pas les capacités nécessaires pour répondre à vos questions, je suis le robot ouvrier MAR-VIN 6X de 2ème génération.

 - Et l'équipage, où est-il ?

 - Je regrette, je n'ai pas...

 - D'accord j'ai compris, l'interrompez-vous avec impatience. Dans ce cas, quel est votre rôle ?

 - Je suis le robot chargé de l'entretien des panneaux de protection contre les vents solaires de la coupole astronomique tribord.

 Au même moment, apparaît de l'autre côté de la vitre du dôme la silhouette du robot MAR-VIN 6X, celui-ci se maintient à l'aide de ses 4 pinces mécaniques à la surface de la station, prêt à effectuer ses monotones tâches de maintenance.

 - Je vois, et il n'y a aucune avarie à signaler au sujet des panneaux de protection ? lui demandez-vous.

 - Les panneaux de protection ne sont pas en position, je suis en attente d'instructions concernant leur agencement.

 - Vous voulez dire que la coupole n'est pas protégée en ce moment ?

 - Le taux de pénétration des vents solaires au sein de la coupole est de 95%.

 Quelle horreur ! Et bien sûr ce robot ne pouvait pas vous prévenir du danger immédiatement ! Si vous voulez que la coupole astronomique soit protégée des flux ionisants, il vous faudra définir le plan de placement des panneaux de protection afin que MAR-VIN 6X puisse les placer convenablement... Ah ces robots !

 [Vous perdez 25% de santé si vous n'avez pas résolu le mécanisme de cette salle au moment où vous y entrez.]

 À l'instant où vous passez l'écoutille, vous avez comme la désagréable impression d'étouffer. Cette pièce est totalement déconnectée du système d'aération, et l'air vicié qui y transite est saturée de dioxyde de carbone. Vous reprenez une grosse bouffée d'air dans le sas, puis vous vous élancez au sein de cette nouvelle salle.
 Sans perdre de temps, vous fouillez dans ce qui traîne au sol pour découvrir en premier lieu une desserte contenant des graines de légumes. Vous ne pouvez empêcher la déception de vous envahir, la faim commençant à vous tirailler de l'intérieur. Juste à côté, vous distinguez aussi une bâche plastique en parfait état, au dessous de laquelle vous dénichez un tournevis et une scie. Vous ne savez pas trop si ces objets ont un lien, ou peut-être qu'ils se rapportent au fait que la salle donne l'impression d'être en complète rénovation...
 Après quelques secondes, vous commencez à avoir des vertiges, et vous choisissez de quitter les lieux rapidement.

 [Vous perdez 10% de santé. Vous perdez 5% de santé supplémentaires pour chaque objet ramassé.]

 L'air est sec, chaud, lourd. Devant vous, un ronronnement lumineux s'extirpe d'une succession de quatre anneaux grossiers entourant un large caisson d'acier. La lumière est vive, rougeoyante, elle occulte même les pâles lueurs qui filtrent à travers les hublots de la pièce. Vous y êtes enfin, au centre même de la station spatiale, au cœur du système qui lui confère toute son énergie, pourtant vous ne pouvez vous empêcher d'avoir une certaine retenue au devant du réacteur à fusion. Vous craignez à tout moment de le voir exploser, une crainte que vous savez être disproportionnée étant donné que la station a actuellement plus de chances de s'écraser que d'être détruite par cette machine...
 Vous vérifiez machinalement le tableau de bord pour constater de l'énergie que peut encore fournir le réacteur, l'instant d'après, vous observez de nouvelles baisses dans la luminosité qui occupe l'habitacle. Les anneaux se rétractent, le réacteur paraît s'essouffler, comme prêt à s'endormir définitivement. Puis soudain, il reprend sa course de plus belle, le ronronnement s'accroît et tout redevient normal.
 Le temps presse et vous en prenez conscience. Malgré tout, vous n'avez aucune idée de comment soutenir la dynamique du réacteur, vous avez beau lire toutes les notes dispersées aux quatre coins de la pièce, aucune ne vous informe sur la démarche à suivre, ou le jargon scientifique employé vous reste trop inaccessible. Il doit pourtant y avoir un moyen, après tout le roi Fromagnus ne vous a pas envoyée ici sans penser que vous aviez une maigre chance de réussite !

 Votre désespoir vous mène alors vers un vieux livre que vous ouvrez sans grand ménagement. Si de prime abord le document vous semble bien obscur, il finit par vous renseigner sur le fonctionnement du réacteur :

 « [...] Afin d'assurer que le réacteur à fusion 126-807 dispose de toute l'énergie nécessaire, il faudra préalablement convenir de la bonne disposition de plusieurs systèmes de bord. Le réseau de base assurant la distribution transversale de l'énergie est étroitement lié à la séquence de flux énergétique, celle-ci doit absolument être insérée convenablement en tête du réseau. La station doit également disposer d'un correcteur de trajectoire opérationnel. Enfin, assurant la protection du réseau de base, le bouclier thermique doit être parfaitement actif, ainsi que le second... [le reste de la page est arraché] »

 Vous refermez le livre pour vous approcher du flanc gauche du réacteur afin d'essayer de trouver d'autres indications à sa surface. Si vous n'en décelez aucune, vous notez cependant qu'il y a une trappe circulaire à sa base. Le système est ingénieux puisqu'il isole complètement le réacteur lorsque la trappe est en position ouverte. À l'inverse vous imaginez fort aisément que ce que vous pourriez placer dans cette trappe se retrouverait instantanément au sein même du réacteur dès lors que la trappe serait refermée. Vous accueillez cette découverte avec méfiance toutefois, car introduire un objet dans un réacteur à fusion n'est jamais sans conséquence, et les conséquences peuvent justement s'avérer dramatiques...

 L'humidité qui occupe la salle est phénoménale et vous comprenez rapidement pourquoi. Des cuves occupent chaque coin de la pièce, si bien qu'il ne vous reste qu'un croisement parfaitement orthogonal de deux couloirs pour vous déplacer à l'intérieur. Vous vous interrogez sur la finalité de ces réservoirs et c'est en vous approchant de plusieurs étiquettes collées à leur base que vous comprenez qu'il s'agit de cuves remplies d'eau potable.
 Plus loin, vous apercevez sur le mur qui vous fait face un enchevêtrement de tuyaux surmontés d'une grosse vanne papillon, disposant d'une plaque en métal indiquant ce qu'elle délivre : de l'eau non-potable. Il y a donc sous cette vanne un dispositif mal ordonnée de tuyaux et de robinets secondaires pouvant en totalité être soit ouverts, soit fermés. Enfin, et c'est cela qui cristallise toute votre attention, plusieurs boîtiers contenant des systèmes de filtration ou de purification sont fixés à la paroi, parfaitement raccordés au réseau de tuyauteries.

 Après rapide analyse de l'installation, vous concluez que se trouve en face de vous un système de traitement des eaux. C'est un point vital qu'il vous appartient de remettre en marche pour assurer une distribution optimale de l'eau potable dans toute la station. Pour ce faire, il faudra que le système fonctionne de manière autonome et en continu. Mais soyez prudente ! Si vous ne voulez pas risquer une contamination des eaux d'alimentation, il vous faudra être sûre des bonnes vannes à ouvrir, de celles qui devront absolument rester fermées et de la conformité du parcours que suivra l'eau pour être potabilisée...

  Journal de mission
  Jour 6

 Hier, la station a commencé à trembler dangereusement. Les parois de métal des pièces se sont mises à vibrer pour former un vacarme assommant. J'ai d'abord cru que tout était fini, que la station spatiale avait déjà entrepris sa dislocation et que rien ne pourrait plus nous sauver. Heureusement ce n'était pas ça, ce qui n'était pas pour autant une bonne nouvelle.
 Quand je me suis approché d'une coupole d'observation sur la partie bâbord du vaisseau, ma vue s'est perdue sur le magnifique spectacle de la planète sortant de son sommeil. L'obscurité nocturne sur tous les méridiens me faisait face, peu à peu estompée par un voile de lumière vigoureuse. Pourtant une toute autre chose a retenu mon attention.
 Au pôle nord, une aurore boréale gigantesque s'est mise à perturber l'atmosphère. Luisant d'un vert puissant, les particules chargées du vent solaire ont commencé à s'étaler juste devant mes yeux. Le phénomène, aussi extraordinaire qu'impressionant, était remarquable par ses dimensions. Bientôt, d'autres flux solaires sont venus envahir le ciel planétaire, s'épanchant jusqu'à des latitudes plus basses, couvrant un bon tiers de l'atmosphère.
 C'est alors que j'ai finalement fait le lien avec les tremblements intenses de la station. Une tempête solaire était en train d'avoir lieu. Pas une tempête ordinaire revenant toutes les décennie, une tempête énorme capable de détruire durablement toutes les communications. Il est difficile d'imaginer qu'une telle force invisible puisse provoquer de si gros dommages. Pourtant les vents solaires ont ainsi continué à s'abattre jusqu'à aujourd'hui, faisant s'échauffer chaque compartiment de la station. J'espère que les dommages ne seront pas nombreux, j'espère que cette nouvelle menace ne viendra pas ralentir mes objectifs. J'espère qu'au moins la tempête s'arrêtera dans les prochains jours, ce sera au moins un point rassurant !

 L'espace de la pièce est occupé par ce qui ressemble à une imposante citerne mais qui n'en est pas tout à fait une. D'une hauteur d'un peu plus d'un mètre, d'une longueur bien plus grande, il s'agit là d'une machine dont le rôle vous reste bien obscur de prime abord. Puis lorsque vous approchez d'une console numérique, vous ne pouvez vous empêcher d'en effleurer la surface, déterminant que ce gros pavé n'est autre que le correcteur de trajectoire de la station.
 Sur l'écran, les coordonnées successives de votre position dans l'espace se mettent à jour automatiquement, si bien que vous voyez défiler en face de vous aussi bien des schémas positionnels semblables à celui qu'offre le tableau de bord (ils sont toutefois plus détaillés), mais aussi l'historique intégral des positions de la station spatiale sur son orbite.
 Pourtant, ici aussi quelque chose ne fonctionne pas convenablement ! L'écran du correcteur d'orbite ne peut s'empêcher de clignoter d'une lumière rouge, ce qui ne fait qu'empirer vos inquiétudes. En cherchant plus en détails sur la console, vous finissez par trouver l'origine du problème : le réservoir de propergol dont les propulseurs se servent pour corriger la trajectoire s'avère être presque vide. Or, l'alimentation provient exclusivement de ce réservoir, qu'alimente un large conduit à la base du bloc occupant la salle. Vous prenez toutefois connaissance d'une indication de sécurité primordiale à sa base, à laquelle vous devrez absolument vous conformer si vous ne voulez pas courir à votre perte :

 En face de vous apparaît une lunette astronomique en parfait état, brillante sous une coupole ouverte sur l'espace, le cosmos versant ses lumières insensibles sur l'objet d'aluminium. La monture astronomique est grande, très grande, le tube de visée mesure à lui seul plusieurs mètres de long, et vous n'osez imaginer la taille et le poids relatifs des lentilles qui composent cette lunette.
 Vous pénétrez plus encore dans la pièce, montant les marches menant à l'occulaire du dispositif. D'imposantes manivelles permettent de faire pivoter la lunette de manières verticale et azimutale dans le but de pointer un objet précis du ciel. Divers ordinateurs en contrebas doivent aussi permettre d'effectuer ces actions de façon automatique.
 Lorsque vous regardez à travers l'occulaire, vous êtes déçue de constater que la lunette ne donne sur rien, ou du moins, que vous n'y voyez rien de particulier. Vous déplacez à plusieurs reprises la monture vers des amas d'étoiles pour augmenter vos chances, mais le résultat est le même. Vous prenez alors soin de vérifier qu'aucun filtre ou écran ne vienne perturber la vision, cela dit il n'y a rien de tel obstruant le tube.
 Alors très judicieusement, vous manipulez l'occulaire pour déterminer la propreté de sa lentille, et c'est à ce moment que vous constatez qu'il n'y a tout bonnement pas de lentille à la base de la lunette ! C'est un point fort embêtant qui empêche toute observation du ciel nocturne. Il vous faudra donc trouver un moyen de substitution si vous souhaitez utiliser d'une quelconque manière cette lunette...

 Vous entrez dans la salle des machines. Vous vous attendiez alors à y trouver une quantité astronomique d'ordinateurs, de tableaux d'informations ou d'énormes tables comportant des cartes holographiques tridimensionnelles pivotables d'un simple geste de la main, comme toute bonne série de science fiction en possède. Il n'en est rien.
 Un peu perdue au milieu de la salle, se trouve une table dont la surface ne dépasse pas le mètre carré. À sa surface, un ordinateur dort paisiblement. Chose étrange, un extincteur est aussi posé en équilibre sur l'aplat que forme le haut de l'écran, comme si les précédents utilisateurs de l'ordinateur craignaient de le voir s'enflammer à tout moment...
 Au final vous êtes un peu déçu de découvrir une salle des machines aussi réduite, et vous commencez vraiment à vous demander si cette station a réellement été lancée dans l'optique de fonctionner véritablement... Alors vous vous approchez de l'écran, et tout naturellement, vous commencez à toucher sa surface pour déclencher une réaction.

 - Bonjour, je suis HAL 80000 !

 - Bonjour ! répondez-vous avec surprise. On m'a envoyé pour éviter que la station ne soit détruite... Ça a sûrement un rapport avec le réacteur, mais je ne sais pas ce que je dois faire. Peux-tu m'aider ?

 - Je suis l'assistant numérique assurant le fonctionnement du générateur de pesanteur.

 - Et... ça signifie que tu peux m'aider ?

 - Je peux vous aider sur des questions relatives au fonctionnement du générateur de pesanteur.

 - Je vois... Pourtant on est dans la salles des machines, je pensais que tout pouvait être géré d'ici !

 - Cette position me donne quelques prérogatives effectivement, répondit HAL 80000. Dans ce cas, aidons-nous mutuellement. J'ai quelques informations données par mon programme frère HAL 100000 au sujet du réacteur à fusion.

 Vous êtes un peu dérangé par ce comportement un peu trop vivant qu'arbore l'ordinateur, pourtant vous ne pouvez laisser passer cette chance d'avoir un indice sur la manière de résoudre le problème majeur qui hante la station... Ainsi vous répondez :

 - D'accord HAL 80000, que puis-je faire pour toi ?

 - J'ai besoin des informations contenant le motif séquentiel du générateur de pesanteur, elles sont stockées au sein d'une disquette qui en toute vraissemblance, doit se trouver proche de la salle des machines. Une fois trouvée, il faudra l'insérer dans la console. Il vous faudra aussi un code de sécurité (s'affiche à ce moment là à l'écran un clavier numérique) composé de sept caractères.

 - Et où se trouve ce code ?

 - Je regrette, je n'ai pas cette information.

 Vous comprenez qu'à partir de là, il vous faudra vous débrouiller seul. Vous repartez donc, dans l'espoir de trouver ce que vous demande l'ordinateur...

 Contrairement à d'autres salles particulièrement vides, celle-ci est l'exact opposé ! Surtout en hauteur, des tables en aluminium sont empilées, rendant vos déplacements prudents et mesurés. Vous essayez tant bien que mal de vous frayer un chemin jusqu'aux autres écoutilles mais certaines parois resteront irrémédiablement inaccessibles. Il n'y a que l'ouverture en face de vous qui pourrait vous permettre de passer dans une nouvelle salle.
 Vous fouillez encore quelques instants la pièce pour trouver sur l'un des meubles entreposés un petit morceau de papier à moitié déchiré contenant une note semblant tout à fait insignifiante :

 Mais comme vous avez l'expérience des choses insignifiantes qui se révèlent être tout à fait importantes, vous préférez garder en mémoire cette découverte. Hormis cela, vous ne trouvez rien d'autre que des feuilles de papier parfaitement vierges, et vous décidez alors de quitter les lieux.

  Journal de mission
  Jour 7

 Une semaine ! Pourtant de multiples questions restent insolvables. Une aujourd'hui s'est ajoutée à cette liste interminable... J'ai pris conscience qu'il y a dans chaque salle, aux côtés du tableau de bord, une petite ampoule électroluminescente dont la couleur varie selon là où je me trouve. Celle où j'ai passé la nuit est bleue, comme celle de la pièce où j'étais hier... Par contre, je suis persuadée que cette dernière était rouge pas plus loin qu'avant-hier ! Pourquoi ces lumières changent-elles spontanément de couleur ? Quel sens donner à cela ?
 J'ai pas mal réfléchi à ce sujet, et je pense que ça a un lien avec le réacteur assurant l'apport principal d'énergie à la station. Il existe visiblement des séquences précises traversant toute la structure, dont la fréquence m'échappe encore. Je tâcherai de suivre l'évolution de ces lumières avec plus de soin. Peut-être que je commencerai à consigner dans ce journal celles que je croiserai, ainsi il me sera plus facile d'y voir clair.

 En pénétrant dans la salle, vous comprenez très vite que vous vous trouvez au sein d'un organe majeur de la station. Tout le long de l'un des murs, une baie vitrée s'étend, surplombant du côté extérieur l'espace vide au devant de la station spatial, et de l'autre côté - intérieur - de larges panneaux de contrôles.
 Cette vue de premier rang est ordinairement l'avantage exclusif du capitaine de bord, alors vous prenez quelques secondes à jouer ce rôle que vous auriez tant voulu occuper, et pas seulement dans vos plus grands rêves de voyages spatiaux (vous n'osez vous mentir à vous-même). Maladroitement, en jouant ce rôle fictif vous trébuchez sur l'un des panneaux, ce qui provoque une alarme stridente sur tout le pont de commande ! Vous ne savez pas exactement sur quoi vous avez appuyé, toutefois vous apercevez qu'un écran s'est allumé :

 Devez-vous effectuer quelque chose de particulier comme semble l'indiquer l'écran ? Vous trouvez bel et bien trois boutons ayant les mêmes couleurs que ceux de l'écran mais sans savoir dans quel ordre appuyer sur ceux-ci, serait-il bien raisonnable de vous engager dans une nouvelle action qui pourrait mettre à mal toute la station ?

 Vous avez beau chercher, il n'y a rien du tout dans cette salle.

 Vous ne savez pas exactement pourquoi, mais cette pièce vous comble de joie. Est-ce la température optimale qui vous met dans cet état ? Est-ce la beauté de la galaxie qui s'étend au travers des fins hublots ? Sont-ce les lueurs des accueillants tubes fluorescents ? Ou est-ce le mélange euphorisant de gaz qui imprègne la salle ?
 Vous n'en savez rien, et vous prenez néanmoins plaisir à traverser cette pièce qui vous rend guilleret. Bientôt, vous venez à la rencontre d'un autre téléporteur de la station, celui des espaces de tête. Celui-là est assez réduit, à peine d'une hauteur de souris, mais il étincelle d'une magnifique énergie, auréolé par une flopée d'ampoules verdâtres lui donnant un air sympathique.
 Après avoir fait connaissance avec le téléporteur, vous concluez définitivement que votre état n'est pas tout à fait sensé, et vous vous précipitez dans l'optique de quitter la salle, espérant que ce n'est effectivement pas l'air qui se trouve être malsain ou délétère...

  Journal de mission
  Jour 8

 Soixante-cinq mille mètres. C'est l'altitude qu'a perdue la station depuis que je suis arrivé en téléporteur à partir du centre scientifique. Soixante-cinq kilomètres disparus en à peine huit jours, soit environ trois cent quarante mètres perdus chaque heure passée ici, plus de cinq mètres toutes les minutes ! Et des nombres catastrophiques comme ceux-là, je peux encore en aligner...
 Si la station spatiale continue à descendre de manière linéaire, elle touchera le sol dans un peu plus d'un mois. Ce scénario semble être fabuleux comme ça, me laissant un large rayon d'action pour sauver la station. Mais ce scénario optimiste ne se déroulera pas. La station spatiale ne descendra pas de manière linéaire car plus elle s'approche de la planète, plus sa vitesse augmente, plus elle est irrémédiablement attirée vers le sol. Ce cercle vicieux provoquera bien plus tôt sa disparition fatale. Sans compter sur les dérèglements supplémentaires qu'a sûrement provoqués la tempête solaire quelques jours plus tôt...
 Je ne peux faire de conjecture précise quant à ce destin funeste, je peux en revanche déterminer exponentiellement à quelle altitude la station ne pourra plus être sauvée. Ce seuil devrait se situer à l'approche de la mésosphère, à une centaine de kilomètres du sol. Les pertes d'énergie du réacteur que me fournit quotidiennement le tableau de bord vont dans ce sens. Je fixe ainsi le point de non-retour à ces cent mille mètres d'altitude. Cela peut sembler énorme, mais je sais au fond de moi que le temps est contre moi. Au delà de cette limite, même si j'arrive à relancer le réacteur, celui-ci n'aura pas une puissance suffisante pour remettre en orbite un objet aussi colossal que la station...
 Si je n'ai pas de date exacte avant que tout espoir ne s'estompe, j'ai à présent une base solide sur laquelle me fixer. Je dois faire tout mon possible pour parvenir à mon but principal, même si cela implique de délaisser certaines choses qui ne présentent pas une importance primordiale.

 Au moment de passer l'écoutille, vous manquez de trébucher sur un objet plutôt gros, il s'agit d'un chariot sur roulettes en caoutchouc supportant un caisson réfrigirant. Vous vous demandez ce que cela fait ici, jusqu'au moment où vos yeux se tournent vers le reste de la salle.
 Il s'agit là du seul point d'accès physique de la station. La quasi totalité des ravitaillements se faisant par navettes spatiales, la nécessité de disposer d'un point d'ancrage, d'un hangar d'amarrage, se révèle cruciale. Vous voici donc dans ce port spatial qui vous paraît plus large que long, cela dit c'est sûrement une simple impression donnée par la porte immense qui occupe l'un des côtés de la salle.
 Il y a notamment un petit vaisseau d'appoint qui devient bientôt le centre de votre attention. Vous en approchant, vous découvrez que le vaisseau ne peut accueillir qu'une seule personne et que le dispositif de pilotage s'avère être extrêmement limité, consistant en un tableau de bord d'une demi-douzaine de boutons accolés à un écran tactile rudimentaire.
 Sur un gros bouton rouge qui traîne à la surface du tableau de bord, vous vous décidez d'appuyer. Une voix se dessine dans l'air ambiant :

 - Bonjour, je suis HAL 40000, assistant de bord pour le vaisseau d'évacuation Serenity ! Lancement du contrôle des paramètres d'évacuation. Température ambiante à 17°C, aucune tempête solaire en approche, pas de sursaut gamma à l'horizon. Les plans de vol sont chargés. Points d'amarrages fixés. Erreur dans le déverrouillage du hangar d'amarrage. Fin du contrôle.

 L'ordinateur de bord s'éteint promptement et vous comprenez que quelque chose ne va pas avec le hangar. Vous vous approchez alors de l'énorme porte de métal devant permettre l'accès aussi bien à l'espace qu'à la station. À côté d'une combinaison extravéhiculaire, vous découvrez alors un dispositif lié au verrouillage de la porte. L'écran tactile vous montre une configuration particulièrement étrange :

 À gauche de l'écran, il y a aussi une sorte de boîtier. Vous pensez qu'il s'agit là d'un lecteur optique, et vu les informations gravées à sa surface, vous comprenez que ce qu'il attend, c'est un code d'accès. Vous avez désormais la certitude exacte que si vous portez l'ambition d'utiliser le vaisseau, il vous faudra préalablement déjouer le dispositif de verrouillage du hangar...

  Journal de mission
  Jour 9

 Sans compter ma bien piètre rencontre avec le cuisinier de bord, avec divers robots placides, cela fait neuf jours que je suis isolé du reste du monde. Le temps commence à m'être long et pourtant tout aussi insuffisant. Je peine à avancer et à déterminer mes objectifs. Peut-être n'est-ce là que la conséquence de ma solitude, occultant ma façon d'analyser mon environnement, m'empêchant de voir clair dans mes actions, pourtant je sens bien au plus profond de moi que ce n'est pas que ça. Au dehors, une menace pèse, pas seulement sur moi, pas seulement sur la station, mais sur l'intégralité de notre planète.
 J'ai beau me rassurer en me disant que les équipes au sol doivent tenter par tous les moyens de trouver une solution subsidiaire à la crise qui s'annonce, je ne peux m'empêcher d'arriver à la conclusion qu'ici, il n'y a que moi : une bouteille jetée à la mer dans l'espoir qu'elle touche un quelconque rivage. Qu'en est-il justement de la situation au sol ? À chaque fois que j'y pense, j'ai d'affreuses images de désespoir et de désolation qui me viennent à l'esprit. Il m'est impossible d'éviter à ces sombres pensées de m'envahir. J'espère que la panique ne s'est pas généralisée, que le roi aura réussi à contenir la folie et la détresse des personnes habitant le royaume. Pourtant inlassablement me reviennent ces visions oniriques d'un monde ensanglanté, recouvert de poussières et de tristesses. Est-ce une idée de ce qu'il se passe actuellement au sol ? Ou est-ce là ce qu'il pourrait advenir si j'échouais ? Dans un cas comme dans l'autre, la situation n'a rien d'enviable. Et que ce soit pour mes proches ou pour tous les inconnus qui n'ont peut-être pas même conscience de leur avenir, je dois concentrer mes forces sur mon objectif.

 Lorsque vous arrivez dans la salle, vous ne pouvez réfréner un souffle de désespoir. Devant vous se trouve le poste de communication avec les équipes restées au sol. Sauf qu'il n'y a rien d'ordonné dans la masse de hauts-parleurs, de câbles emmêlés et de micros qui vous font face. Tout est disposé sur une pauvre table qui tente péniblement de supporter toute cette masse envahissante, ployant légèrement mais tentant avec force de se maintenir.

 - fzzzz... le roi... fzzzz... station sp... fzzzz... endez-vous... fzzzz

 La voix que vous entendez est sans aucun doute celle du roi Fromagnus ! Vous dirigeant vers l'un des micros, vous tentez logiquement d'établir une communication, mais en tout état de cause, cela est impossible. Pourtant tout semble fonctionner parfaitement, les voyants sont au vert, rien ne clignote de façon inquiétante, et les câbles, bien qu'entremêlés, paraissent chacun avoir leur utilité propre.
 Il y a néanmoins bien une chose qui paraît laissée à l'abandon et qui pourrait avoir un rapport avec votre incapacité à émettre un message : une serrure rouillée isole un système électronique que vous supposez être le dispositif d'émission. Il vous faudrait la bonne clé pour ouvrir ce compartiment et potentiellement pouvoir entamer une discussion avec la voix entrecoupée du roi Fromagnus.

  Journal de mission
  Jour 10

 Dixième jour depuis le commencement de ma mission. J'ai aujourd'hui la certitude que les créatures ne sont pas de simples envahisseurs venus de l'espace, ou le fruit de tout organisme extraplanétaire. Je pense avec grande conviction que les monstres que j'entends et que je croise depuis plusieurs jours faisaient partie de l'équipage de la station. Cet affreux constat ne provient pas que de moi. Hier, je suis tombé sur un journal de bord abandonné dans une salle de repos, dont les derniers mots resteront éternellement imprégnés dans ma mémoire :

 « Ils sont partout. Plus le temps passe, plus ils le deviennent. Cela a commencé avec le capitaine. Il l'a trop regardé... L'espace l'a rendu fou ! »

 « Je ne peux pas rester en place... Le capitaine, ou ce qu'il en reste... a détruit le poste de communications. Nous sommes coupés du sol. Je ne peux pas rester en place, ils sont plusieurs maintenant... Je dois me déplacer, ils viendront pour moi ! »

 Penser à ces quelques phrases me glace d'effroi. Pourtant, il s'agit là d'une découverte majeure, permettant d'une part de donner une part d'explication à la présence de ces créatures. D'autre part, ces notes donnent de maigres informations sur l'explication de ces transformations. "Il l'a trop regardé...", les mots du journal reviennent dans ma tête. Qu'est-ce que le capitaine a bien pu voir pour devenir ainsi ? Le temps n'est pas à mon avantage, et à cela s'ajoute une invasion de créatures qui ne me veulent rien de bon ! Lorsque je reviendrai au sol - si j'y reviens - chaque jour m'apparaîtra comme un bonheur incommensurable à côté de ce que je vis ici...

  Journal de mission
  Jour 11

 J'ai fait la plus désagréable des rencontres ce matin. Son cri a été le premier à me parvenir. Son hurlement ténébreux depuis une salle attenante, comme si cette chose savait que j'attendais juste à côté. Ont-elles un odorat hors du commun les aidant à traquer ce que leur vue ne leur permet ? Connaissent-elles mes actions, mes gestes ? Savent-elles ce que je tente de faire, et surtout, veulent-elles m'en empêcher ?
 Je ne m'autorise pas à faire trop de spéculations. Cela dit, ce que j'ai vu n'en a pas besoin. Je vais tenter dans ce journal de retranscrire cette horrible vision, cette rencontre, telle que je la conçois. Car même si ce n'en était pas une, l'impression qui m'est laissée est tout comme. J'ai rencontré cette créature.
 Elle m'est apparue comme une traînée d'ombres s'étalant sur un hublot de la pièce, une noirceur progressive envahissant et supplantant même l'obscurité spatiale ! Elle n'avait rien de grand, elle n'avait rien de difforme mais j'ai tout de suite ressenti les ténèbres qui habitaient son corps. Cette créature est vivante, se déplaçant comme n'importe qui le peut. Je l'ai vue à travers ce hublot, elle, dans le vide de l'espace. Couverte d'une couche de givre, elle n'a pas été affectée par le vide de l'espace. Elle n'a pas manqué d'oxygène. Respire t-elle ? Elle s'est déplacée sans crainte, sans tressaillir. Et tout en me fixant de ses yeux rougeoyants, elle a disparu.

 M'a t-elle véritablement considérée ?
 Ces ombres envahissent mon esprit... Elles sont multiples, surgissant des ténèbres pour m'envahir de plus en plus ! J'ai l'impression que tout provient de l'espace... Sa noirceur ! Sa noirceur recouvre la station ! Je le vois tous les jours, ce vide incommensurable... Chaque jour à travers chaque hublot de chaque pièce, il est là ! M'attendant, me consummant à moitié ! Et mes nuits... Mes nuits sont de pire en pire. C'est le moment propice pour que les ombres m'atteignent, elles m'étouffent de leur voile ébène. À chaque sursaut, je les vois fondre dans l'obscurité, disparaissant pour mieux revenir quelques minutes après ! Mes nuits n'en sont plus, je reste toujours en alerte. Je suis fatigué...

  Journal de mission
  Jour 12

 Depuis combien de temps la station est-elle véritablement devenue hors de contrôle ?
 Quand l'équipage a t-il commencé à se changer en ces créatures ?
 À marcher inlassablement dans ces couloirs, j'ai peu à peu pris l'habitude de me ressasser ces questions. Déjà, force est de constater que certains indices laissent un moindre doute quant à la soudaineté de l'apparition du phénomène, notamment les salles laissées trop souvent à la merci du temps... La première salle qui m'a accueilli en est un bon exemple, les outils ayant servi à la réparation du téléporteur n'étaient même pas rangés, alors que l'ordre dans une station spatiale s'avère être une nécessité absolue... Que penser du poste de télécommunications sujet à un état d'abandon plus que critique ? Des éviers brisés ? Des salles de repos laissées dans un désordre innommable ?
 Ensuite, l'état de propreté de certaines salles me laisse perplexe. Non pas qu'il me vienne un élan soudain de perfectionnisme ménager, mais plutôt qu'il y a clairement un contraste énorme entre des pièces tout à fait propres et d'autres qui semblent ne pas avoir été nettoyées depuis plusieurs semaines. Certaines ont-elles volontairement été abandonnées ? Si c'est le cas, cela dure depuis plus de temps que je ne le pensais... Je sais que les communications avec le sol sont coupées depuis peu. Cela étant pour arriver à délabrer à tel point une station de cette envergure, une force surprenante a forcément dû se manifester à un moment ou à un autre.
 J'ai l'intime conviction que ces créatures sont responsables de ce trouble généralisé. Leurs déplacements ont peut-être obligé le reste de l'équipage à fuir dans plusieurs secteurs de la station, ont-ils essayé de se prémunir des créatures ? Certaines salles laissent imaginer qu'ils n'ont pas tenté outre mesure de se barricader, peut-être comptaient-ils sur le verrouillage des sas entre chaque pièce. Si c'est le cas, mal leur en a pris puisqu'à l'heure actuelle, plus rien n'empêche quiconque de se déplacer librement dans la station...

  Journal de mission
  Jour 13

 Enfin une bonne nouvelle ! Du moins, elle l'est à moitié. Curieusement, les salles n'ont pas pivoté comme elles le font à l'accoutumée chaque nuit. Quotidiennement, ces mouvements suivaient un schéma précis que j'avais peu à peu appris à apprivoiser, auxquels je m'étais habitué, me forçant à agir en conséquence. Cette nuit, la rotation a été toute autre car les plans que je m'étais fixés semblent à présent faux. Chose néanmoins étrange : toutes les pièces paraissent accessibles.
 J'ai d'abord pensé qu'un système quelconque s'était remis en route pour forcer les pièces à se maintenir convenablement mais très vite le tableau de bord, et l'énergie du réacteur m'a indiqué que rien de si optimiste ne s'était produit. Probablement que la station se trouve à présent très proche de la planète, trop proche. Les salles ne pivotent plus car quelques forces électromagnétiques visant à les repousser ou les attirer en fonction de la position de la station spatiale sont compensées par l'attraction planétaire. Pour ainsi dire, la station est maintenant trop basse pour que les salles puissent se mouvoir librement.
 Cette hypothèse me semble la plus probable. Alors oui, certes cela va m'aider car mes déplacements seront facilités. En revanche, cela m'inquiète davantage sur le temps qu'il me reste avant le point de non-retour. Il me faut revoir mes calculs, pour être sûr que le temps qui m'est imparti sera suffisant...

 En ce treizième jour, le tableau de bord m'indique que seulement deux cent un kilomètres me séparent du sol. Quelques jours plus tôt, je pensais fort positivement que la station avait encore une chance d'être sauvée au delà du seuil limite de cent kilomètres d'altitude. Si je ne remets pas en cause cette limite, je suis bien moins confiant en ce qui concerne le temps qu'il me reste. Ces derniers jours, l'énergie du réacteur a subi plusieurs saccades qui ont profondément entamé ses réserves. Beaucoup trop.
 Je ne sais pas si ces perturbations ont été provoquées par des morceaux d'astéroïdes, ou simplement par les changements de température au sein de la thermosphère, je ne sais pas davantage si elles sont responsables du blocage de toutes les salles. Néanmoins cela aura deux conséquences. La première est donc que la capacité du réacteur est désormais moindre par rapport à celle que j'espérais. La seconde est que, même si je maintiens la limite d'altitude du point de non-retour, je dois totalement remettre en cause le délai que je pensais avoir pour ma mission.
 De nouveaux calculs me font penser que la station commencera à frôler la mésosphère au quinzième jour, si sa trajectoire suit effectivement une courbure progressive cumulative de facteur un virgule trois, ce qui est actuellement le cas. Dans le cas où mes comptes seraient justes, l'énergie totale que possède le réacteur sera alors passée sous la barre des trente pourcents. Au delà, la fusion qui alimente le cœur de la machine risque tout bonnement de s'interrompre, à défaut d'avoir assez de matière pour l'alimenter, à défaut de posséder assez d'énergie pour compenser l'accélération de la chute. Tout sera alors terminé.

  Journal de mission
  Jour 14

 La lumière revient peu à peu, l'étoile en est sûrement la source, inondant la station de ses lueurs vivaces. Je dois me reprendre et ne pas succomber à la folie. Car j'ai maintenant la confirmation que c'est exactement cela qui a emporté l'équipage.
 En lisant plus en détails le livre de bord ramassé quelques jours auparavant, il semblerait que le vide spatial soit à l'origine de ces transformations. Les membres de la station sont peu à peu tombés dans les ténèbres, accordant toutes leurs pensées aux assombrissements de l'espace, se transformant langoureusement en ces créatures horribles. Le vide, comme une puissance ancienne, harassée par les flux cosmiques, battue incessamment par les vents solaires, a détourné chacun de ces malheureux... devenant ce que je redoute quotidiennement de croiser dans ces couloirs.
 Les notes du livre de bord comportent des écritures différentes, signe probable que ses écrivains ont été multiples, se passant les uns les autres la lourde tâche de narrer leur quotidien, au rythme des transformations. Un passage, écrit vraisemblablement par le médecin de la station, indique que le processus n'a pas été soudain, accordant une certaine tranquilité aux malades. Le vide s'est complu à modifier leur constitution génétique, comme une affection extraplanétaire, non-biologique, mais chargée en rayonnements spatiaux.
 À partir de maintenant, si je ne veux pas être dévolu au même sort, je dois absolument éviter de contempler le vide au delà du vaisseau. Je dois rester concentré pour sauver la station. Je ne peux pas prendre le risque de succomber moi aussi à la folie !

  Journal de mission
  Jour 15

 Le tableau de bord est en grande partie affecté par les pertes d'énergie de la station. Depuis ce matin, son affichage est pour moitié corrompu. Qui plus est, l'afficheur orbital n'a de cesse de clignoter d'une lumière orangée qui ne me rassure pas davantage. J'essaie au mieux de conserver mes forces, ma concentration. C'est une épreuve impossible ! Je dois réduire mes consignations dans ce journal. Je dois me concentrer sur ce qui est nécessaire, laisser de côté tout ce qui est superflu. Je crains que le temps me manque réellement à présent...
 La station est parcourue de toutes parts de tremblements craintifs. Ils sont à peine perceptibles, pourtant ils restent bien réels. Il me faut trouver une autre porte de sortie, un autre moyen de quitter la station, dans le cas où ma mission serait un échec... Il y a bien ce vaisseau de détresse que j'ai croisé plus tôt... Les téléporteurs peuvent-ils m'être d'une quelconque utilité ? Je ne pense pas avoir plus que quelques jours pour trouver une solution à l'horreur qui s'annonce. Au delà, tout ceci n'aura plus aucune raison d'être.


  ➤ Les sacrifices

 La dernière ligne est devant vous, mais il vous reste peu de temps.

 Ainsi en ce quinzième jour, apparaît une nouvelle et ultime action : l'action Sacrifier. Celle-ci vous permettra d'obtenir toutes les informations et objets débloqués normalement lors de la résolution d'un mécanisme. Si en utilisant cette action, le mécanisme est dès lors considéré comme résolu, vous ne gagnerez néanmoins pas les PS liés à ce dernier. À l'inverse, l'utilisation de cette action vous coûtera 8 PA ainsi que 50 PS qui ne pourront être récupérés, ils seront définitivement perdus. Utilisez donc cette action avec parcimonie !
 Je vois déjà la question arriver : non, le mécanisme de la salle 44 ne peut pas être résolu avec cette action, et c'est bien dommage...


  ➤ Carte d'exploration

 Retrouvez les descriptifs de toutes les salles ici.

  Journal de mission
  Jour 16

 La station ne tiendra pas un jour de plus, j'en ai l'amère impression. Les salles ont commencé à perdre pour partie leur bouclier thermique, si bien que la chaleur à bord ne cesse d'augmenter. L'inertie du complexe scientifique la pousse déjà à être érodé par l'atmosphère. Les parois tremblent. Les hublots craquent. Les sas se déforment. Même les créatures accordent leurs mouvements à la panique.
 Je dois maintenant partir. La fin approche.

 Après seize jours passés dans l'espace, l'histoire s'achève. Pour certains, la conclusion est arrivée plus tôt, positivement. Pour d'autres, l'histoire s'est terminée avec une bien triste vue du ciel en feu ! Voici donc les quatre fins possibles de l'histoire :

    ➤ Fin 1 : vous avez réussi à relancer le réacteur en salle 44...

 Vous vous remémorez avec une fierté particulière toutes les étapes qui vous ont permis d'en arriver là où vous en êtes. Vous vous souvenez de votre arrivée dans la station spatiale à l'aide du téléporteur, vos débuts hésitants dans les premières salles qui vous sont apparues. Toutes les actions entreprises pour parvenir à vos fins. Tout particulièrement, vous retenez le moment où vous avez récupéré votre premier orbe, le premier du quatuor des sphères primaires permettant d'initier la fusion du réacteur... Vous retenez l'instant où vous avez réuni les quatre au cœur du réacteur, à peine hésistante ! Puis le message affiché sur le tableau de bord, vous indiquant que tout était terminé, qu'une navette allait venir prochainement vous chercher au sein de la station...

 Voilà, tout est effectivement bouclé. Vous êtes désormais à bord de la navette de secours, prête à regagner le sol. À vos côtés, le sourinaute-cuisiner est là lui aussi, endormi, sa fatigue l'a emporté de nouveau. Les hublots du vaisseau vous permettent de contempler la station spatiale, sereine et légère, en suspension au beau milieu du vide. Les étoiles ponctuent ce tableau merveilleux, et vous ne pouvez vous empêcher d'exprimer un soulagement. Alors au même moment, tandis que vos yeux fixent ce vide, la présence des créatures vous revient en mémoire. Que va t-il advenir d'elles ? Y aura t-il une solution pour redonner leur forme aux membres de l'équipage ? Vous savez qu'il vous faudra tôt ou tard mentionner ce problème au roi Fromagnus, de même qu'il vous faudra lui faire un résumé détaillé de votre mission... Vous soupirez. Tout cela vous épuise déjà rien qu'en y pensant.

 Alors vous prenez le temps de rêvasser, bien loin, très loin des ténèbres de la station spatiale. La vue de la planète vers laquelle file la navette comble de plus en plus votre champ de vision. Ses formes et reliefs se détaillent peu à peu, laissant entrevoir les contours du royaume. Bientôt, vous arriverez à destination. Toutes les menaces de l'espace sont définitivement à mille lieues de vous.

 La finalité désastreuse approchant à grands pas, vous avez pris la résolution de fuir la station en empruntant la navette Serenity. Vous avez pour cela déverrouillé préalablement le hangar, puis vérifié les constantes de bord du vaisseau de détresse. Vous avez pris soin d'emporter une tenue extravéhiculaire, ce qui de toute manière était indispensable pour envisager votre extraction de la station, l'ordinateur de bord veillant avant tout à l'accomplissement de cette condition.
 Vous avez enclenché la séquence de démarrage, la navette a précisément refermé chaque ouverture du vaisseau, envoyé l'information à la station pour ouvrir le quai d'amarrage. Le hangar a brillé de mille couleurs clignotantes, puis quelques minutes après, a lentement été dépressurisé. Devant vous, le vide spatial s'est étendu. Alors spontanément, le pilotage automatique de la navette d'évacuation s'est mis en marche, vous propulsant à vitesse modérée au dehors de la station.

 Quelques minutes après avoir quitté les lieux, vous apercevez depuis la baie du vaisseau les formes dantesques du centre scientifique, monstre d'acier d'une cinquantaine de mètres de longueur, flottant péniblement sur son orbite chaotique. La navette ralentit jusqu'à se positionner à l'aplomb de la station spatiale, vous pouvez ainsi contempler une dernière fois votre échec. Devant vos yeux, le monstre modulaire ploie sous les contraintes de l'atmosphère, consumé par l'atroce chaleur des frottements. Certains compartiments se détachent de la station, se désagrègent dans la mésosphère... Vous n'avez le cœur de voir la suite de ce spectacle. Vous prenez alors les commandes du vaisseau pour faire le tour de la planète, attendant que la tempête se soit calmée. Après plusieurs heures, vous choisissez enfin d'effectuer une rentrée atmosphérique à bord de la navette de sauvetage, pour revenir sur votre monde, un monde qui n'aura définitivement plus jamais le même visage...

 Vos connaissances en téléportation vous ont permis de quitter la station avant que celle-ci ne soit détruite ! En effet, alors que vos calculs prédisaient que votre mission n'aurait plus aucun sens au delà du seizième jour, plusieurs phénomènes se sont mis à confirmer votre hypothèse. Les craquements des épaisses parois des salles, la chaleur grandissante dans celles-ci, des signes qui ne trompaient pas quant au devenir du centre scientifique.
 Ainsi, ni une ni deux, vous vous êtes approché d'un téléporteur, vous avez pris le temps de le configurer comme le Guide du voyageur par téléporteur vous l'avait enseigné. Même si vos interventions ont été plutôt hésitantes, agissant sous la peur de voir se disloquer à tout moment la station, vous avez appliqué avec précision et délicatesse ses recommandations.

 Vient maintenant le moment de prendre place et de déclencher le mécanisme. Vous n'avez pas peur, vous êtes confiant. Alors la machine se met en route et vous emporte bien loin du cataclysme annoncé. Les lumières tourbillonnent, les couleurs s'entremêlent, créant un patchwork mal agencé de l'espace. Lorsque vous reprenez vos esprits vous constatez que la cabine de téléportation qui vous a réceptionné est en piteux état, n'ayant pas résisté à votre arrivée. Vous entreprenez de regarder plus en avant autour de vous, pour prendre connaissance de votre environnement. Rien ne ressemble à votre monde. Vous êtes loin. Trop loin. En tout état de cause, votre voyage en téléporteur a transcendé l'espace, vous menant beaucoup plus au delà de ce que vous connaissez de l'univers.
 En face de vous s'alignent ce qui ressemble à des arbres de feu, rougeoyant sous les lueurs célestes d'une triade d'étoiles. Un nouveau monde s'ouvre devant vous, une planète à l'autre bout de l'espace où vous devrez passer le reste de votre existence...

 Vous voici au devant du hublot d'une salle quelconque. Vous avez tout abandonné. En face de vous, la planète vous attend, entourée par sa puissante bulle atmosphérique. Déjà les fureurs de l'air repoussent la station, faisant trembler les compartiments de métal. Pour le peu qu'il en restait, les boucliers protégeant le complexe se désagrègent complètement. Bientôt la chaleur se met à croître considérablement dans l'habitacle où vous vous trouvez. Les parois tremblent avec de plus en plus de férocité, provoquant un vacarme assourdissant. Peu à peu, vous voyez apparaître dans votre champ de vision, d'autres compartiments se détacher du complexe modulaire, d'autres salles désolidarisées entamant leur descente au cœur de l'atmosphère, freinées par une force incommensurable, jusqu'à se désagréger, exploser, sous son intensité.
 Vous comprenez que tout est terminé, que vous avez échoué. Le reste de la station initie sa destruction. Elle achève sa descente dans un spectacle bruyant, apocalyptique. Vous ressentez l'effet de l'accélération laquelle vous plaque de plus en plus au sol, empêchant tout mouvement de votre part, et qui de toute manière, se serait avéré bien vain. Juste après, des parois de la pièce, se dégagent des poussières carbonisées de l'isolant des murs. Alors vous fermez les yeux, vous entendez une dernière explosion, et tout prend fin ici.

Il y fut expédié avec très peu d'indices,
Sur ce que, là-haut, lui dit-on : grouillait désordre et panique.
Pas même ne fut envoyée, du royaume, la milice,
Au sein de l'espace, dénué de tout support phonique.

Non, il ne cria pas, c'était sans intérêt.
Incessamment dans l'ombre des menaces spatiales,
Il parcourut la station, suspicieux, limitant ses arrêts,
Rencontra MAR-VIN et la famille HAL, quelques machines asociales.

Sûrement, il ne voulut tarder,
Ramassant ici et là à peine ce qui lui semblait nécessaire,
Quand vint les épreuves, sans doute, il s'y attelait,
N'ayant pour seul regret de ne donner vie à ses deux tubes de lumière.

On le nommait Mistigrounet.
Il avait prit place dans la station perdue, raconte l'histoire,
Y répara la plomberie en tournant les robinets,
Gloire pour ce haut-fait, pour sa survie, pour sa victoire !


⁂

Félicitations à tous les aventuriers !

Le score maximal théorique possible était de 1840 points de succès,
se décomposant de la manière suivante :

740 points pour la découverte des salles (20x37 PS)
850 points pour la résolution des mécanismes (50x17 PS)
250 points pour la résolution de l'intrigue principale

(vous retrouverez les PS de tous les participants
sur le second message du sujet)