Vous abaissez franchement le premier levier. Des bruits de chaînes commencent à peupler la cathédrale et assez vite vous constatez que s’ouvre une étroite fosse entre vous et la cage de la malheureuse souris prisonnière. La panique vous prend pendant quelques secondes, mais finit par disparaître lorsque vous voyez se déplacer la cage vers un lieu plus sûr à l’autre bout de la salle. Elle se pose tranquillement sur le sol, sa porte se déverrouille d’elle-même, et la souris libre, vous fait des signes vifs que vous traduisez comme de simples remerciements.
 Celle-ci vous quitte finalement en s’engouffrant dans une ouverture à l’autre bout de la fosse, et de votre côté vous vous décidez très vite à l’imiter en prenant une autre porte à l’opposé. Avant de partir, votre regard est une dernière fois attiré par le siège royal au centre de la cathédrale. Vous voyez en effet un coffre ouvert, dévoilant un magnifique diamant dont les teintes argentées et bleutées lui donnent un éclat magnifique. Vous vous empressez de le ramasser et quittez définitivement la salle.

 Sans réellement être convaincue vous actionnez le second levier. Le roulement des chaînes sur les poulies fait écho dans toute la cathédrale, et bientôt s’ouvre un gouffre béant à même le sol ! La fosse qui fait maintenant plus de cinq mètres de largeur, achève de s’agrandir. Le bruit des chaînes s’interrompt et vous retenez votre souffle. Avec horreur, vous constatez alors que se met en mouvement la cage de la pauvre souris enfermée, et celle-ci s’approche du vide qui vient d’apparaître.
 S’agitant dans sa case, la malheureuse est tout aussi impuissante que vous. Instantanément la chaîne qui retenait la cage en suspension se met à devenir lâche et la cage se fait happer par la fosse. La chaîne est entraînée par le poids du monstre de fer, et dans sa cinétique, libère l’une des cloches, laquelle tombe avec une célérité impressionnante, pulvérisant le sol, projetant un bloc de marbre dans votre direction, et vous assène un coup violent au niveau de vos pattes. Vous prenez quelques instants pour être sûre d’être encore en mesure de continuer... Le nuage de poussières qu’a provoqué la chute de la cloche se dissipe lentement. Quant à la fosse où a disparu la souris, vous n’osez y regarder davantage, et vous préférez quitter les lieux, horrifiée.

 Il y a comme un léger silence après que vous ayez poussé le levier. Vous ne comprenez pas, alors vous l’actionnez de nouveau plusieurs fois. Mal vous a pris car très vite, un bruit soudain vous fait comprendre que des chaînes se mettent en mouvement. L’instant d’après, une fosse immense prend place autour du trône, vous entraînant dans une chute de quelques mètres. Au contact avec le fond de la fosse, vous êtes éjectée sur l’un de ses murs.
 Si la chute ne vous a pas coûté la vie, vous trouvez finalement une échelle incrustée dans l’une des parois verticales du trou, vous permettant de regagner la surface de la cathédrale. Vous constatez que la souris qui était enfermée n’est plus là, ni elle, ni sa cage. Vous espérez qu’elle ait trouvé un moyen de sortir et vous quittez la pièce.

 La lumière qui vous entoure vous permet d’éclairer d’une vive intensité chaque recoin de la pièce. En vous approchant des deux arches, vous remarquez que la lumière les dissipe. Elles sont tout à fait immatérielles, ce n’est qu’une simple illusion qui est effacée au moment où vous tentez de les éclairer. Il n’y a plus d’arches, plus la moindre ombre. Même les instruments de torture qui vous entoure paraissent beaucoup moins effrayant avec les lueurs rassurantes qui vous accompagnent.
 Sans la moindre difficulté, vous atteignez l’autre bout de la pièce que vous quittez dès à présent.

 Vous enlevez le bouchon de la fiole et avec un certain doute, vous buvez le poison que vous a conseillé de prendre la souris. Au début, le liquide incolore ne fait aucun effet. Pourtant, vous ressentez très vite des picotements au bout de chacun de vos membres. Les lignes des objets autour de vous commencent à onduler devant vos yeux, comme victimes d’une hallucination.
 L’inquiétude vous quitte néanmoins lorsque votre environnement redevient normal et consistant. Vos forces vous reviennent, et vous ne sentez même plus l’odeur amère qui vous avait accueillie ici. Vous ne tardez pas à donner le reste de la fiole à la souris étendue sur le sol, laquelle sort de sa paralysie peu à peu pour retrouver un visage bien moins blême, une vitalité bien différente :

 – Je vous dois la vie ! vous dit-elle. Je venais pour chercher le trésor dont tout le monde parle... Mais je crois que j’ai sous-estimé les dangers de la tour...

 – Vous savez comment accéder au trésor ?

 – Je sais qu’il se trouve au dernier étage, gardé par un système plus vicieux que toutes les épreuves que vous avez pu rencontrer jusque là... Je n’irai pas aussi loin. Je vais quitter la tour, je ne risquerai pas davantage ma vie, ça n’en vaut pas la peine...

 Les dires de la souris ne présagent rien de bon. Le trésor de l’ancien roi de la tour d’ébène paraît inaccessible, pourtant vous n’êtes pas prête à baisser les bras.
 La souris renouvelle ses remerciements, vous souhaite bonne chance et vous quitte en prenant le chemin du retour. Vous traversez alors la porte au bout de la pièce, laissant la serre et ses nombreuses plantes baignées des faisceaux nocturnes.

 Vous ne faites pas confiance à la souris. Ou du moins, vous préférez rester méfiante en prenant la seconde fiole dont le goût vous rappelle une simple tisane aux fleurs. Vous ne vous sentez pas mieux, ni plus mal. Du moins au début, car très vite vous vous rendez compte que plus vous respirez, plus votre état s’aggrave. Vous en venez à la conclusion que la souris ne mentait pas et que des spores présents dans l’air ont déjà commencé à vous empoisonner...
 Vous hésitez encore un peu, mais vous vous résignez à boire le contenu de l’autre fiole. La douleur est immense et vous chutez à terre. Les deux poisons se mêlent à l’intérieur de votre pauvre corps et luttent réciproquement. Au bout d’interminables minutes, si le poison ne vous a pas emportée, vous tentez tant bien que mal de vous relever, vos forces vous reviennent progressivement.
 Vous tâchez de donner le reste de la fiole contenant le poison à la souris, dans l’espoir qu’il agisse contre les spores de la même manière qu’il vous a aidé. Le changement est fulgurant. Son état devient moins inquiétant, et même si elle peine à retrouver toute sa lucidité, la petite souris vous demande de continuer votre route :

 – Vous avez un but ici... vous explique t-elle. Le trésor... bien sûr vous devez l’atteindre. Vous avez beaucoup à faire... Partez maintenant.

 Vous ne comprenez pas très bien pourquoi la souris vous presse à quitter les lieux. Peut-être craint-elle que d’autres dangers n’arrivent ? Peut-être a t-elle perdu la raison ? Vous lui proposez de l’aider à retrouver la sortie, mais de nouveau elle vous explique que vous devez continuer... Un peu résignée, vous prenez ainsi la porte, pour accéder à la pièce attenante.

 Au plus profond de vous, vous espérez que l’alternative que vous envisagez n’est pas juste folle, mais qu’elle peut aussi vous permettre de sauver votre vie ! En effet, manger simplement la moitié d’une pomme pour combattre le poison, il fallait bien avoir une dose d’espoir pour essayer cette éventualité...
 À votre plus grand étonnement, votre état n’empire pas, ne s’aggrave pas. Vous décidez de donner l’autre moitié de la pomme à la souris que vous venez de rencontrer. Elle ne comprend pas davantage et paraît même étonnée par ce contre-poison que vous venez tout simplement d’improviser. Recouvrant ses forces, après quelques remerciements, de rapides explications, elle vous fait un état rapide de la situation :

 – J’ai l’impression que la tour gagne en puissance, vous dit-elle d’un air inquiet. Je ne sais pas comment c’est possible... mais une énergie étrange vit ici. Certains aventuriers que j’ai rencontrés croient que c’est l’âme de l’ancien roi qui imprègne la tour... Je ne sais pas quoi en penser, mais dans tous les cas, il vous faudra détruire cette énergie avant d’espérer atteindre le trésor !

 Sous ces mots alarmants, la souris vous fait comprendre qu’elle en restera là pour ce qui la concerne, et qu’elle ne s’aventurera pas davantage dans la tour. Vous vous séparez ici. De votre côté, vous partez en prenant la petite porte au bout de la pièce.

 Vous n’avez pas vraiment le temps d’écouter les fabulations des autres aventuriers, et vous avez probablement mieux à faire, trouver un trésor par exemple. Qui sont-ils pour vous demander de l’aide ? Sans lui apporter d’explications, vous laissez la souris allongée sur le sol, reprenant votre expédition.
 Ce n’est qu’un peu plus loin que vous vous rendez compte d’un phénomène étrange s’emparant de vous. Vous ressentez des douleurs dans votre crâne dont vous n’arrivez à vous défaire. Ces douleurs sont perçantes, vous donnant des vertiges, produisant une migraine soudaine et puissante. Vous vous tenez la tête, et vous vous précipitez sur les deux fioles dont vous a parlé la souris.
 Vous buvez entièrement celle qu’elle vous a conseillée, de telle manière qu’assez rapidement, la douleur finit par s’éloigner sans pour autant disparaître complètement. Si votre santé n’a pas totalement été drainée par le poison, vous quittez la pièce sans revenir sur vos pas. Vous n’avez aucune raison de traîner davantage ici.